Elle n’avait jamais vraiment compris le français. Fascinée par les émissions de variétés, chaque samedi soir elle chantait des airs du moment. Réfugiée dans une parenthèse enchantée, elle oubliait tout ce qui avait façonné ses souffrances intérieures d’idiote du village, de petite immigrée mal dégourdie et de veuve élevant seule ses cinq enfants. Aujourd’hui, elle a quatre-vingt-treize ans et vit avec le célibataire de la fratrie qui lui lit La peau de chagrin de Balzac tous les soirs. Pour lui, la lecture est depuis toujours une réalité à des désirs enivrants, intégration et ascension sociale.